Contrôle technique moto : du lobbying à gogo

    Le serpent de mer de la moto se nomme "contrôle technique". Alors même que le parlement européen est une nouvelle fois éclaboussé par la corruption d'une partie de ses membres, voilà que le gouvernement français remet au goût du jour le projet européen d'un contrôle technique des deux roues motorisés.

   Le lobbying, voilà l'ennemi des motards européens. Mais de quoi est-il question ? Le lobbying est une forme d'influence feutrée qui se pratique dans les lieux de décision. Les secteurs économiques (banque, industries, agriculture, énergies...) à travers leurs syndicats professionnels, leurs organisations interprofessionnelles, leurs entreprises phares ou bien encore de leur Etat d'origine entrent en relation avec les élus des peuples pour orienter leur choix lors des votes au parlement. Cette pratique très courante dans le monde anglo-saxon est inhabituelle pour les députés français qui, depuis quelques années, reçoivent une formation pour faire face à ces VRP de l'emprise que sont les lobbyistes. Des budgets substantiels sont engagés par les acteurs de cette forme de mise sous pression douce pour convaincre ou acheter des représentants démocratiques.

   C'est dans ce cadre que les entreprises de certification - dont l'allemande Dekra - se sont données pour objectif d'imposer le contrôle technique des deux roues dans la droite ligne de la vérification de tous les autres engins motorisés. Selon eux, cette mesure pourrait mettre définitivement fin à l'usage des pots de détente et autres collecteurs de seconde zone qui polluent la vie des autres usagers de la route sans parler des habitants des logements bordant les grands axes de circulation de notre continent.

   Seulement, l'effectif de motards en infraction et le nombre de sinistres causés par un incident mécanique se comptent pratiquement sur les doigts d'un gant. En effet, tout utilisateur a parfaitement conscience du danger que représente une bécane incapable de tenir la route. A titre personnel, je ne connais aucun pratiquant négligeant l'entretien de sa machine. Au contraire, je fréquente des passionnés du chiffon gras et de la pompe à pied. Est-ce que la minorité des crétins irresponsables doit imposer une contrainte supplémentaire à la majorité des encasqués ?

   Dans une époque où les minorités agissantes prennent parfois le dessus sur les majorités silencieuses, j'estime qu'il est nécessaire de marquer notre franche opposition à une décision qui n'a aucun intérêt pour la collectivité. En effet, les solutions permettant de mettre un terme aux abus existent déjà. La vérification aléatoire des engins pratiquée par les forces de l'ordre en bord de voie nécessite déjà un passage aux Mines (DREAL) après la remise en conformité du deux roues motorisé en infraction. A cette occasion, le contrevenant subit une double peine en réglant à la fois la contravention (135 €) et l'examen mécanique (environ 100€ selon les modèles). Ainsi les fidèles du vacarme et les kamikazes du bitume ont déjà maille à partir avec le contrôle technique.

  Conservons donc cette politique de bon aloi qui assure la sécurité de tous tout en traquant les contrevenants. En fait, résister au contrôle technique moto revient à dissuader les entreprises de certification de faire leur profit sur le dos d'usagers responsables. Sans cela, la suite est déjà écrite. Le temps viendra où la conformité du lieu de stockage de votre véhicule sera soumise à règlementation. N'y a-t-il pas danger de feu électrique et de pollution des sols sur votre lieu de parking ? Une fois entré dans votre domicile, il s'agira de s'assurer de la bonne configuration de votre logement afin de pouvoir souscrire à une assurance sans gonflement disproportionné des franchises. Quel en sera alors l'argument massue ? Si les victimes de la route sont environ 3000, celui des morts par accident domestique oscille autour de 12 000 par an !

   Le contrôle technique deux roues n'a qu'un unique intérêt : générer artificiellement de l'activité pour des entreprises en mal de croissance perpétuelle. Les citoyens en selle seront-ils capables de réfréner l'appétit des capitalistes en fauteuil ?